Bon voyage, film de Jean-Paul Rappeneau, commentaire

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Bon voyage,
        2003, 
 
de : Jean-Paul  Rappeneau, 
 
  avec : Isabelle Adjani, Gérard Depardieu, Virginie Ledoyen, Yvan Attal, Peter Coyote, Aurore Clement, Edith Scob,
 
Musique : Gabriel Yared


 
Lire le poème (CinéRime) correspondant : ' Courage, fuyons ! '

 
Viviane Denvers (Isabelle Adjani) est une actrice très en vogue dans les années 1935. Elle a pour amant un ministre, Jean-Etienne Beaufort (Gérard Depardieu). Un soir, elle appelle en catastrophe un ancien admirateur, Frédéric (Gregori Dérangère) et lui demande secours pour la débarrasser du cadavre d'un "gêneur" André Arpel (Nicolas Pignon). Le jeune homme accepte et a la mauvaise idée d'avoir un accident de voiture avec le cadavre dans le coffre ! Il est arrêté, mais quelques semaines plus tard, la guerre étant déclarée, s'évade avec un compagnon, Raoul (Yvan Attal), lors d'un transfert des prisonniers. Ils fuient à Bordeaux, font la connaissance en chemin de la jolie Camille (Virginie Ledoyen) qui accompagne un mystérieux Professeur, Kopolski (Jean Marc Stehlé). Tous, y compris les membres du gouvernement, se retrouvent à Bordeaux... 
 
 Il y a parfois des mystères insondables dans les échecs et les réussites des oeuvres cinématographiques. Comment un tel film a-t-il pu passer quasiment inaperçu lors de sa sortie en salles ? Jean-Paul Rappeneau, soixante et onze ans au compteur, retrouve dans cette histoire aux ramifications multiples, la verve, le rythme, l'énergie bouillonnante qui marquent la plupart de ses réussites, depuis "Les mariés de l'an II" en 1971, jusqu'à "Cyrano de Bergerac" (1990), en passant par "Le sauvage" en 1975 et "Tout feu tout flamme" (1982).  
 
 Créateur d'un genre à part entière que l'on pourrait qualifier de "vaudeville dramatique", Rappeneau nous entraîne, au milieu d'une période de l'histoire française hautement tragique (capitulation, fuite du gouvernement...), dans un tourbillon de quiproquos, de poursuites, de diableries, d'aventures héroï-comiques, qui mêle, avec une habileté diabolique, un entrain permanent, les destins de quelques individus ordinaires et les premiers pas dans l'engrenage national de personnages de premier plan (de Gaulle, Pétain).  
 
 Dans le cinéma de Rappeneau, les personnages courent toujours beaucoup ! Ils se trouvent, se quittent, se retrouvent dans un va et vient incessant, virevoltant. Bien sûr, pour un esprit cartésien, logique, toutes ces coïncidences qui s'amoncellent, se heurtent, peuvent paraître déroutantes, voire rebutantes. Mais, à partir du moment où l'esprit accepte cette valse ininterrompue, c'est une véritable jouissance qui s'empare du spectateur. Il se laisse emporter par cette ribambelle d'intrigues qui s'interpénètrent savamment, par cette urgence qui dicte chaque plan, par cette apparente superficialité narrative qui n'empêche nullement chaque personnage d'exister avec une belle intensité. De la vamp manipulatrice, excellemment croquée par Isabelle Adjani, au Ministre opportuniste, en passant par le jeune admirateur, le truand au grand coeur ou la digne (et combien ravissante Virginie Ledoyen !) scientifique, tout ce petit monde s'agite pour notre plus grand bonheur et parvient à combiner divertissement et période sombre. 
 
 Deux heures de vie intense. Un régal enthousiasmant, accompagné de plus par une superbe musique !
   
Bernard Sellier