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Les enfants du silence,
    (Children of a lesser god),      1986, 
 
de : Randa  Haines, 
 
  avec : William Hurt, Marlee Matlin, Piper Laurie, Philip Bosco, John F.Cleary, Allison Gompf, Philip Holmes,
 
Musique : Michael Convertino, Jean-Sébastien Bach,

 
   
James Leeds (William Hurt) arrive en tant que nouvel enseignant dans l'établissement pour handicapés auditifs et oraux dirigé par le docteur Curtis Franklin (Philip Bosco). Il est tout de suite intrigué puis irrésistiblement attiré par une jeune femme, Sarah Norman (Marlee Matlin), employée comme femme de ménage. Il se rend très vite compte qu'elle est tout à fait capable de tâches moins matérielles, mais elle se refuse obstinément à entrer en contact avec lui. Ce n'est que partie remise... 
 
   Construit sur un canevas semblable à ceux de "Will Hunting" et de "A la rencontre de Forrester", le film développe les trois niveaux inhérents au genre : opposition agressive - observation - apprivoisement. Avec les quelques variantes dramatico-sentimentales qui s'insinuent dans chacun des paliers. Autant dire que le spectateur n'est jamais vraiment surpris, encore moins bousculé, et que l'intérêt majeur réside dans la qualité de l'analyse des personnalités, des blocages intérieurs et dans le magnétisme plus ou moins grand des relations intimes. S'y ajoute cependant, dans le cas présent, le fait que le personnage de Sarah soit incarné par une actrice d'autant plus exceptionnelle, qu'elle-même est sourde-muette. Pour son premier film, elle se montre aussi convaincante, touchante, gorgée de colère, bourrée d'une énergie qui ne demande qu'à exploser, que laissant percer sur son visage un éclair de confiance et d'amour. Sans vouloir minimiser la qualité de l'interprétation, toute en finesse, de William Hurt, il est évident que le charme et la valeur de l'oeuvre reposent pour la plus grande part sur elle. Sans pour autant négliger l'intrigue qui a l'intelligence et la pudeur de ne jamais recourir à des explorations hautement dramatiques ou à des traumatismes spectaculaires, façon "Le Prince des Marées". 
 
   Les événements, simples, amenés avec spontanéité, contribuent grandement à installer une atmosphère authentique, qui favorise une entrée en sympathie immédiate du spectateur avec un être a priori inatteignable, puisque non communiquant par la parole. Mais, chacun le sait, même intuitivement, le langage des gestes et, surtout, celui du regard, sont au moins aussi éloquents que celui du verbe, et l'amour véritable est l'énergie cohésive par excellence, et il n'existe aucune haine qui lui résiste, pour la simple raison que celle-ci n'est qu'une absence d'amour et n'a pas de réalité énergétique propre. Dommage, peut-être, que les relations entre James et ses élèves se réduisent à l'état de saynètes plus utiles au décor que véritablement signifiantes. Mais Randa Haines a choisi d'axer son film sur la rencontre et l'apprivoisement mutuel de deux êtres d'exception, et elle l'a fait avec un respect tendre qui illumine le récit.
   
Bernard Sellier