La jeune Shosanna Dreyfus (Mélanie Laurent), cachée dans le sous-sol de la maison de Perrier LaPadite (Denis Menochet), échappe de peu à l'extermination de sa famille, exécutée par le sadique Colonel Hans Landa (Christoph Waltz). Pendant que l'officier nazi poursuit ses purges, un commando d'une dizaine d'hommes, sous la direction du Lieutenant Aldo Raine (Brad Pitt), se donne pour mission de dégommer le plus grand nombre possible de suppôts hitlériens...
Il ne fait pas de doute que le réalisateur, tout en fabriquant toujours fidèlement du Quentin Tarentino, parvient à surprendre encore le spectateur. Dans quel sens, chacun le déterminera suivant son ressenti du moment. Avec un thème de base qui rappelle forcément les "12 Salopards" de Robert Aldrich, et l'habitude que nous a donnée l'auteur, depuis "Reservoir dogs", de carburer aux mitraillades déjantées, l'oeuvre semblait annoncer une suite de coups de force spectaculaires, agrémentés d'hectolitres d'hémoglobine. Première surprise : exception faite d'une séquence de "récupération de trophées", nous ne voyons quasiment jamais à l'oeuvre les "inglourious basterds" ! En revanche, l'inondation de dialogues interminables ne fait pas défaut. Point positif, ceux-ci sont tout à fait supportables et, fréquemment, se révèlent même source de jubilation. Ce qui n'était pas vraiment le cas de ceux qui gangrenaient "Boulevard de la mort". Non pas que Tarentino, auteur du scénario avec Tom Tykver, se découvre soudainement un pouvoir de dissection aigu des personnalités. Celles-ci, tout comme leurs motivations, demeurent au niveau élémentaire de perception d'un potache surdoué. L'auteur s'amuse comme un petit fou à remodeler l'histoire (uchronie), et à caricaturer les personnalités réelles (extraordinaire Goebbels (Sylvester Groth), excité comme un gamin par la production de son film de propagande sur le soldat Fredrick Zoller (Daniel Brühl)), avec les traits acérés de son délire intérieur. Et puis il y a surtout Hans Landa, extraordinaire création de bourreau, aussi policé dans ses manières d'investigateur, que sadique et implacable dans l'exécution de ses sentences. Brad Pitt disparaît complètement de la mémoire, tant le charisme vénéneux de Christoph Waltz imprègne l'intégralité du drame. Mais, surprise là aussi, même lorsque le chasseur de Juifs est absent de l'écran, comme dans la longue scène où intervient la délicieuse Bridget von Hammersmark (Diane Krüger), l'inventivité et le plaisir sont toujours présents. Cela dit, cet ensemble historico-ludico-tranfiguré, brillamment réalisé, demeure tout de même sacrément puéril, creux, et d'une primarité totale. Mais c'est sans doute là une des raisons du charme pendable qu'il procure...