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Légendes d'automne,
        (Legends of the Fall),      1994, 
 
de : Edward  Zwick, 
 
  avec : Brad Pitt, Anthony Hopkins, Aidan Quinn, Julia Ormond, Henry Thomas, Karina Lombard,  
 
Musique : James Horner

 
   
1913. Le Colonel Ludlow (Anthony Hopkins), abandonné par sa femme Isabel (Christina Pickles), vit dans son ranch avec ses trois fils, Alfred (Aidan Quinn), l'aîné, Tristan (Brad Pitt), le préféré, et Samuel (Henry Thomas). Ce dernier revient de voyage en amenant une fiancée, la ravissante Susannah Fincannon (Julia Ormond). Mais la guerre éclate en Europe et Samuel veut à toutes forces s'engager, malgré la colère de son père, écoeuré des tueries indiennes qu'il a menées. Alfred et Tristan l'accompagnent. Ils reviennent seuls un an plus tard. Susannah est devenue amoureuse de Tristan, mais, incapable de supporter la mort de son frère, le jeune homme part à l'aventure, la laissant seule avec Alfred... 
 
   Après avoir, semble-t-il, hésité entre la comédie ("About last night", 1986, "Leaving normal", 1992) et le drame ("Couvre-Feu", "Glory", 1989), Edward Zwick s'est apparemment rangé du côté des grandes fresques épiques, dont "Le dernier Samouraï" est actuellement le couronnement. On ne peut que s'en féliciter, pour peu que l'on soit sensible à l'accumulation de drames qui couvrent, dans cette aventure, une période d'un demi-siècle.  
 
  Tout commence comme dans un beau conte de fées, et dans une forme académique. Trois frères apparemment unis, l'amour qui frappe à la porte sous les traits d'une merveilleuse créature (Julia Ormond, radieuse de beauté est poignante dans un personnage où le non-dit prend le pas sur l'exprimé)... Mais l'inconscience juvénile aura vite raison de ce qui s'annonçait comme une voie radieuse vers le bonheur. Romance passionnelle, certes, mais, à l'instar d'"Autant en emporte le vent", peuplée de caractères entiers tout en étant subtilement analysés, et de moments d'émotion intense. Comme il l'a montré dans son dernier film avec Tom Cruise, Edward Zwick a le sens de la narration épique, nimbée de sensibilité et de noblesse. Les événements, pour violents ou terribles qu'ils soient, n'empiètent jamais sur la peinture des souffrances intimes, des désespoirs corrosifs. Les relations conflictuelles entre les deux frères et le père sont aussi crédibles que fiévreuses. A coups de touches sensibles et au gré de l'évolution dramatique, s'affirment les blessures de chacun : Tristan, le rebelle, peu respectueux des lois, des règlements, ne parviendra jamais à faire taire en lui la "colère de l'ours" qui le ronge, le fait osciller entre la vie et la mort, lui qui a pourtant été le bien aimé du père et de deux jeunes femmes ! Alfred, en apparence fort et sage, respectueux de l'ordre, brillant, ne guérira jamais de n'avoir pas été aimé. Quant à Susannah, le chavirement de son coeur ballotté entre des êtres dissemblables, ne lui apportera jamais la paix.  
 
   Une grande fresque, certes théâtrale par instants, mais à la densité bouleversante. Et Brad Pitt y est magnifique !
   
Bernard Sellier