Narc, film de Joe Carnahan, commentaire

  Bienvenue sur le site d'un manipulateur de mots, passionné d'écriture, de cinéma, de musique, d'ésotérisme...     

Narc,
     2002, 
 
de : Joe  Carnahan, 
 
  avec : Jason Patric, Ray Liotta, Dan Leis, Lloyd Adams, Meagan Issa,
 
Musique : Cliff Martinez

   
 
Nick Tellis (Jason Patric) est un flic infiltré parmi les narco-trafiquants. Au cours de la poursuite d'un dealer, il blesse une jeune femme enceinte qui perd son bébé. Dix-huit mois plus tard, alors qu'il a quitté la police et vit d'allocations chomage avec Audrey (Krista Bridges) et leur fils, il est contacté par ses anciens supérieurs pour reprendre l'enquête sur l'assassinat de Michael Calvess (Alan van Sprang), policier lui aussi infiltré. Il finit par accepter mais impose la participation, à ses côtés, de l'inspecteur Henry Oak (Ray Liotta), enquêteur démis de sa fonction pour violences... 
 
 Noir de chez noir ! Cette oeuvre haletante, dramatique, par moments horrifique, saisit le spectateur dès les premières secondes où l'on assiste à une course poursuite filmée comme un documentaire, jusqu'à un dénouement qui laisse un goût plus qu'amer et âcre devant ce qui n'est une victoire pour personne. Proche, par l'atmosphère glauque et le réalisme sauvage des personnages, de "Training day", le récit dissèque avec une brutalité primaire et une justesse de tous les instants une incursion dans le magma des drogués où représentants de l'ordre, trafiquants et consommateurs sont aussi différents dans leurs psychologies et leurs comportements que deux vrais jumeaux ! Portée par un souffle incendiaire, une énergie permanente qui ne s'apaise que quelques minutes pour laisser entrevoir une lueur d'humanité chez l'un des protagonistes, la narration doit énormément aux deux acteurs principaux, qui se fondent dans la peau de ces flics à la limite de la paranoïa avec une authenticité époustouflante. Jason Patric, sorte de cousin germain physique et spirituel de "Serpico", est d'une sobriété linéaire hypnotisante. Quant à Ray Liotta, au regard naturellement inquiétant et particulièrement à son aise dans des rôles de psychotiques (voir par exemple "Obsession fatale"), empâté, massif, méconnaissable, , il campe ici, avec une acuité poignante, ce flic ambigu qui noie dans la violence son désarroi intérieur. Absence totale d'esbroufe et de superflu, tempéraments ambigus, incontestable rigueur des séquences, récit tendu jusqu'à l'extrême rupture, voilà un polar maîtrisé, infernal, pervers et passionnant.
   
Bernard Sellier