Bienvenue sur le site d'un manipulateur de mots, passionné d'écriture, de cinéma, de musique, d'ésotérisme...     

Polar park,
      Saison 1,      2023, 
 
de : Gérald  Hustache-Mathieu, 
 
  avec : Jean-Paul Rouve, Guillaume Gouix, Jérémy Barlozzo, India Hair, Aliénor Bouvier,
 
Musique : Jérémy Barlozzo, Stéphane Lopez 

 Ne pas lire avant d'avoir vu la série...
 
 
David Rousseau (Jean-Paul Rouve), écrivain en panne d'inspiration, arrive à Mouthe, village le plus froid de France, afin de rencontrer un moine qui aurait recueilli en confession un secret livré par sa mère. Hélas, le moine vient de mourir. Pendant ce temps, l'adjudant Louvetot (Guillaume Gouix) enquête sur un cadavre qui vient d'être retrouvé grimé en Van Gogh, tandis que son oreille était découverte dans Polar park...
 
 Il ne faut pas longtemps pour se rendre compte que nous sommes dans un polar qui n'aura rien de très sérieux. Ou plus exactement, dont l'approche criminelle alliera légèreté et fantaisie. La proposition n'est pas déplaisante en soi. Ce qui l'est davantage, c'est de voir que les lobbies LGBTQ ont encore frappé. La commandante de gendarmerie, Bellerose (Firmine Richard) est noire, ce qui n'est pas l'élément le plus vraisemblable dans un village glaciaire du Doubs, tandis que l'adjudant Louvetot est l'amant de son médecin légiste, Lyes (Adel Djemai). Ça fait quand même beaucoup pour un casting qui regroupe une dizaine de personnes, et la justification narrative de ces choix échappe totalement. Mais passons. Comme on peut s'y attendre, l'écrivain de polar déprimé qu'est David va s'engouffrer dans ce mystère et abandonner sans trop de regrets la quarante-cinquième version de son ouvrage sur le Ku-Klux-Klan, pour plonger dans l'énigme de ce tueur en série qui transforme ses meurtres en œuvres d'art sur fond de musique classique et d'opéra. Comme on peut s'y attendre également, David va se faire jeter par l'adjudant, avant de voir reconnaître, à leur juste valeur, ses intuitions et ses constructions mentales. Les personnages secondaires se voient aussi affublés de tempéraments pour le moins étranges et décalés. Il y a les moines qui sont un peu bizarres, le patron du bistrot qui ressemble à un guerrier viking prêt à couper la tête de ses clients, un responsable de médiathèque qui semble complètement à l'ouest, une professeure de français légèrement glauque, et deux gendarmes qui ne paraissent pas avoir le gaz à tous les étages. Cela dit, nous ne sommes tout de même pas dans la grosse pantalonnade grotesque, façon «Ma Loute», et le récit sait conserver une tenue constante malgré tous ces oripeaux excessifs. La (très) bonne surprise, c'est qu'au fil de l'évolution de l'intrigue, l'intérêt s'éveille de façon régulière, alliant avec bonheur une inventivité excitante, une originalité permanente, un souffle poétique et une mélancolie sous-jacente. Plusieurs références viennent à l'esprit : les enquêtes improbables, à la manière de Prudence et Belisaire Beresford dans «Associés contre le crime», pour le style narratif, ou l'obsessionnelle Annie Wilkes de «Misery». Mais cette création française est loin d'avoir à rougir de ces comparaisons, bien au contraire. L'histoire qui nous est proposée ici est infiniment plus insolite et captivante que celle contée dans le film de Pascal Thomas, tandis que la pathologie criminelle relève d'une Wilkes puissance dix. À cette aventure s'adjoint aussi une intéressante réflexion sur la créativité et l'inspiration.

 Au final, une jouissive réussite. Mais que diable vient faire ici la sympathique Firmine Richard, totalement hors sujet, d'autant plus que l'on ne comprend pas la moitié de ce qu'elle dit ?
  
  Bernard Sellier