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Room,
       2015, 
 
de : Lenny  Abrahamson, 
 
  avec : Brie Larson, Jacob Tremblay, Sean Bridgers, Matt Gordon, William H. Macy, Cas Anvar, Joan Allen, Tom McCamus,
 
Musique : Stephen Rennicks


   
Ne pas lire avant d'avoir vu le film

   
Une jeune mère (Brie Larson) vit avec son fils Jack (Jacob Tremblay) dans une pièce exiguë. Elle lui raconte des histoires et il s'est créé un microcosme personnel dans lequel il semble s'épanouir. Tout semble normal. Mais en réalité, tout est très loin d'être normal... 
 
    Sous les dehors d'une existence certes confinée, mais apparemment chaleureuse entre Ma et Jack, se dissimule en réalité l'horreur permanente d'un emprisonnement comme en révèlent parfois les médias. Depuis sept ans la jeune fille est la proie d'un malade et vit cloîtrés avec son enfant de cinq ans dans une cabane de jardin. Autant dire le genre d'histoire casse-gueule dans laquelle l'équilibre est particulièrement difficile à tenir entre description d'une abomination et plongée toujours possible dans le glauque et le racoleur. 
 
    Autant dire que l'on ne peut qu'être subjugué par la tenue dramatique et la pudeur avec laquelle le réalisateur aborde la première partie du film, jusqu'à la libération des deux otages. La vérité s'insinue progressivement, à travers quelques détails souvent superficiels, qui dessinent petit à petit une réalité insoutenable. Grâce à la voix off de Jack, qui expose avec les limites de sa compréhension, ce qu'est le monde à ses yeux, le récit parvient à désamorcer l'horreur tout en créant une authenticité aussi naïve que bouleversante. Pas une seconde la caméra n'insiste de manière malsaine ou indécente sur ce qu'inflige le monstre à ses deux captifs, respectant dans cette discrétion l'univers magique et fabuleux dans lequel Ma est parvenue à élever Jack pour protéger son intégrité physique et mentale. Il suffit de comparer le film de Lenny Abrahamson au récent "Love hunters", sur un sujet presque semblable, pour prendre conscience de l'écart qui sépare ces deux présentations de l'abomination, même si le film de Ben Young parvient à ne pas sombrer dans le voyeurisme malsain. 
 
    Lorsqu'intervient le sauvetage, on se dit que le cauchemar est terminé. Mais il n'en est rien. Entre le rejet du père (William H. Macy), l'intrusion des medias, et la simple impossibilité de réintégrer sans dommages le monde 'normal', tout est loin d'être rose dans cette libération inespérée. Même si le microcosme a éclaté, ce qui, forcément, change la donne dans l'approche cinématographique des événements, c'est toujours avec une infinie délicatesse et une honnêteté de tous les instants que l'oeuvre suit la laborieuse réadaptation du fils et de la mère. Et c'est une évidence que de constater que tous deux sont époustouflants de naturel aussi bien que de justesse. Depuis la performance ( hélas sans vraiment de suites mémorables ) de Haley Joel Osment dans le " Sixième sens " de M. Night Shyamalan, on n'avait pas vu un acteur enfant aussi charismatique et impressionnant.
   
Bernard Sellier