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Sexe, mensonges et vidéo,
    (Sex, lies and videotape),   1989, 
 
de : Steven  Soderbergh, 
 
  avec : James Spader, Andie McDowell, Laura San Giacomo, Peter Gallagher, Steven Brill,
 
Musique : Cliff Martinez


   
Ann (Andie McDowell) et John (Peter Gallagher) forment une jeune couple aisé. Il est avocat et gagne bien sa vie. Mais les relations sexuelles sont inexistantes. Arrive un jour Graham (James Spader), un ancien camarade de collège de John, qui est devenu tout son contraire... 
 
   La vision de certains "classiques" réserve parfois de mauvaises surprises. Témoin le "Bullitt" vu récemment. Le film qui a lancé la carrière de Steven Soderbergh n'est certes pas très ancien. Je l'avais sans doute vu à l'époque de sa sortie, mais, malgré sa Palme d'Or à Cannes, il ne m'avait pas laissé un grand souvenir. Et ce n'est pas sa redécouverte, trente et un an plus tard qui change la donne. Peut-être était-il novateur, à l'époque, de parler de sexe dans un long métrage. Pourtant mai 68 était déjà une affaire ancienne. Bref, le quatuor observé par Soderbergh est obnubilé par le sujet et se divise en deux catégories bien distinctes. D'un côté ceux qui agissent, sans aucun état d'âme, avec en point de mire le plaisir immédiat : Cynthia (Laura San Giacomo) et John. De l'autre deux personnalités troubles et troublées, qui ont opté pour l'abstraction et un détachement apparent qui a tout de la manipulation mentale. Durant 90 minutes, les quatre protagonistes vont donc parler. Et beaucoup parler. Ce sont évidemment Ann et Graham qui attirent l'attention, car Peter et Cynthia sont concentrés sur le jeu basique de leur relation et se contentent de baiser et/ou de mentir. 
 
   L'ennui, c'est que les pathologies des deux premiers, certes intéressantes, sont tellement enrobées de flou et de masturbation intellectuelle, sans qu'intervienne une évolution notable entre l'arrivée de Graham et la séparation d'Ann, qu'on éprouve beaucoup de difficultés à entrer dans ces deux déprimes dont chaque propriétaire semble finalement se satisfaire. Hormis le coup de gueule de John, tout est mesuré, calibré, normalisé, voire éteint. Comme si un écrêtage radical avait été opéré sur les pathologies. Alors on se demande bien comment l'affiche du film peut parler d'une comédie nerveuse et intense ! Nous sommes à l'opposé du Xavier Dolan de "Mommy". Si ce dernier en fait des tonnes dans l'excès, ce qui n'est pas notre tasse de thé, tout semble ici virtuel, décoloré, aseptisé, atone. 
 
   Un petit 4 étoiles, pour le charme d'Andy McDowell et la troublante subtilité de James Spader.
   
Bernard Sellier