Tunnel, Saison 1, série de Gilles Bannier, commentaire

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Tunnel,
     Saison 1,     2013, 
 
de : Gilles  Bannier..., 
 
  avec : Stephen Dillane, Clémence Poésy, Thibault de Montalembert, Jack Lowden, Sigrid Bouaziz, Joseph Mawle, Jeanne Balibar,
 
Musique : Adrian Johnston, Ben Bartlett

 Saison 2      Saison 3    
 

 
Ne pas lire avant d'avoir vu la série

 Le cadavre d'une femme politique française, Marie Villeneuve (Valérie Zaccomer) est découvert posé dans le tunnel sous la Manche, le buste en France et le bas du corps en Grande-Bretagne. L'inspectrice Elise Wassermann (Clémence Poésy) se retrouve en face de son homologue anglais, Karl Roebuck (Stephen Dillane). Au moment où le corps va être déplacé, ils s'aperçoivent avec stupéfaction qu'il est composé de deux morceaux. La partie inférieure est celle d'une prostituée britannique, Gemma Kirwan (Jacqueline Defferary)...
 
 L'entrée en matière ne manque pas d'originalité, même s'il s'agit d'un remake de la série danoise "Bron/Broen", sortie deux ans plus tôt. Mais elle n'est pas pour autant enthousiasmante. De manière très classique et prévisible, nous assistons à une confrontation explosive entre les deux polices. À cet antagonisme natif et presque naturel, s'ajoute le tempérament entier, c'est le moins que l'on puisse dire, de la capitaine française. Pour être franc, disons même que c'est une véritable tête à claques, qui plus est présentée de façon caricaturale. Cette situation n'est pas a priori handicapante, à condition qu'une évolution s'opère au fil des évènements, ce qui était par exemple le cas de la juge Candela Montes dans l'excellent "Hierro". Pourtant, dans le cas présent, l'agacement commence à perdurer, d'autant plus que Clémence Poésy adopte en permanence un ton monocorde et avale la moitié de ses syllabes. Mais il faut avouer qu'on oublie assez vite de désagrément, car l'intrigue monte en puissance et en mystère au fur et à mesure que se développent les "vérités" énoncées par le tueur. Le récit se montre un peu touffu et les incessantes permutations entre la France et la Grande Bretagne ne sont pas toujours très évidents à suivre. La révélation des différentes "vérités" du tueur permet de dénoncer au passage l'exploitation esclavagiste des enfants par les grandes marques, la situation des personnes âgées, la stigmatisation de certains jeunes, le pouvoir des réseaux sociaux et d'une presse fouille-merde. Mais un certain basculement s'opère lorsque les cinq vérités sont épuisées, et le scénario vire alors sur un drame intimiste avec une vengeance personnelle tardive. Cette seconde partie, un peu déconcertante au premier abord, puisqu'elle fait table rase des revendications politico-sociales précédemment prépondérantes, permet cependant de donner naissance à deux épisodes ultimes paroxystiques et dramatiquement puissants. Stephen Dillane se montre très convaincant dans son rôle de flic en demi-teinte. Clémence Poésy, dans une incarnation d'un Harry Bosch féminin, laisse perplexe. Son personnage est loin d'avoir un impact comparable à celui de Harry, qui, il est vrai, se développe sur plusieurs saisons, et, malgré ses 31 ans au moment du tournage, l'extrême jeunesse physique qu'elle affiche handicape la vraisemblance de son personnage de capitaine de police. Plus gênant encore, sa permanente introversion cynique n'évolue guère et n'apporte pas grand chose au développement de l'intrigue.

Il serait très intéressant de visionner l'original danois afin de comparer les deux traitements narratifs de ce concept original, mais finalement vite oublié dans ce récit tentaculaire. 

   
Bernard Sellier