Les chiens de paille, film de Sam Peckinpah, commentaire

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Les chiens de paille,
     (Straw dogs),     1971, 
 
de : Sam  Peckinpah, 
 
  avec : Dustin Hoffman, Susan George, Peter Vaughan, Jim Norton, T.P.McKenna, Peter Arne, Del Henney,
 
Musique : Jerry Fielding


 
David Sumner (Dustin Hoffman), astro-mathématicien américain, vient d'arriver dans un coin perdu de Grande Bretagne, au bord de la mer, pour écrire un ouvrage sur les radiations inter-stellaires. Il habite, avec sa femme Amy (Susan George) dans une vieille bâtisse que des hommes du village l'aident à retaper. Parmi eux, Charlie Venner (Del Henney), un ancien soupirant d'Amy. Le pub du village est le seul endroit animé. On y boit beaucoup, en particulier Tom Hedden (Peter Vaughan), dont la fille Janice (Sally Thomsett) court après tout ce qui porte un pantalon... 
 
 Ce film est rapidement devenu un classique, deux ans après "La Horde sauvage", pour son apothéose de violence. Aujourd'hui, celle-ci semble bien dérisoire à côté des horreurs façon "Hostel". En revanche, la description psychologique, la progression dramatique et le cheminement implacable vers le point de non retour, n'ont rien perdu de leur efficacité. Petit bonhomme assez falot, relativement timide, perdu au sein d'un monde qui lui est totalement étranger, entouré de personnages primaires, stupides, constamment embrumés par l'alcool, David est une sorte d'ovni naviguant dans son univers de formules mathématiques. Naïf jusqu'à la bêtise (il subit la même humiliation que le jeune Theron dans "Celui par qui le scandale arrive"), il semble avoir définitivement fait sienne la devise : fais semblant de ne rien voir, et tout s'arrangera. Mais, paradoxalement, cette ligne de conduite tranquillisante sera mise en pièces par une cause qui ne le touche qu'indirectement.  
 
 En quelques scènes courtes, en un petit nombre d'échanges concis, le réalisateur installe deux microcosmes destinés, a priori, à ne jamais interférer. Celui d'un intellectuel étranger, absorbé par sa passion et, occasionnellement, par sa charmante femme. Et celui d'un groupuscule de villageois bornés, noyant leur ennui dans le whisky, dont l'ignorance et la bêtise créent une atmosphère aussi lourdement vénéneuse que celle qui baigne "La Fille de Ryan". Tout comme dans le film de David Lean, ce sont en fin de compte les personnages de femmes, en l'occurrence une Amy profondément ambiguë, et, accessoirement une Janice nymphomane, qui brisent le fragile équilibre existant.  
 
 Les aspects sensationnel, choquants, novateurs dans la représentation de la violence, ont quasiment disparu. Il n'y a pas lieu de le regretter, car cela permet d'apprécier pleinement l'oeuvre dans sa dimension psychologique et dans son intensité tragique.
   
Bernard Sellier