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La jeune fille de l'eau,
   (Lady in the water),     2006,  
 
de : M. Night  Shyamalan, 
 
  avec : Paul Giamatti, Bryce Dallas Howard, Bob Balaban, Mary Beth Hurt, Bill Irwin, Cindy Cheung,
 
Musique : James Newton Howard

 
   
Cleveland Heep (Paul Giamatti) est gardien dans une grande résidence de Philadelphie. Il entretient les lieux et connaît tous les habitants. Le jour où Harry Farber (Bob Balaban), un nouveau locataire arrive, d'étranges phénomènes se produisent dans la piscine. La nuit venue, Heep découvre avec stupéfaction qu'une jeune fille séjourne sous l'eau. Croyant qu'elle s'est noyée, il plonge, mais ne découvre personne. Il s'apprête à partir lorsqu'une chute malencontreuse le précipite à moitié inconscient dans l'eau. Quelques instants plus tard, il se retrouve dans son habitation. Auprès de lui, la jeune fille qui l'a sauvé, Story (Bryce Dallas Howard). Il n'est pas au bout de ses surprises... 
 
   Avec les années, M.Night Shyamalan devient décidément de plus en plus déconcertant ! "Le Village" présentait déjà les signes d'un choix de résolution des mystères pour le moins particulier. Mais une grande partie du film n'en conservait pas moins une intensité dramatique consistante et émouvante. Dans le cas présent, c'est d'emblée la plongée dans un conte de fées infantile, annoncé d'ailleurs par un générique à l'esthétique niveau dessin de maternelle. Construite sur un thème parallèle à celui de "E.T.", ou de "Starman", (l'étranger extra-terrestre, qui cherche désespérément à rentrer dans son home sweet home !), l'histoire rogne, dès le commencement, les ailes que l'on espérait voir se déployer. La voix off du générique explique, en effet, que les esprits de l'eau, dont les hommes se sont éloignés depuis bien longtemps, cherchent toujours à envoyer des messagers vers eux, afin de les éveiller. Quoi de plus utile, de plus altruiste, de plus beau ? Mais, patatras !, dès son irruption dans le monde physique, la pauvre envoyée voit sa mission réduite à sauver sa peau ! Qu'elle a particulièrement blanche, d'ailleurs. Certes, ce sauvetage difficile va permettre à quelques humains de découvrir en eux la mission pour laquelle ils se sont incarnés. Ce n'est pas rien. Mais, tout de même, il était possible d'attendre autre chose au niveau de l'enjeu. D'autant plus que cette mise à jour des capacités intérieures ne va pas sans patauger souvent dans le ridicule (la scène hilarante où le petit Joey Dury (Noah Grey Cabey), bombardé interprète de symboles, décode ceux-ci sur des paquets de céréales !). Côté adversaires de la jolie naïade, c'est plutôt gratiné également ! Une espèce de chien monstrueux, recouvert d'herbes, avec une queue en branchages, qui achève de propulser ce pseudo processus initiatique dans les ornières du grotesque.  
 
   Les principes fondamentaux sur lesquels le réalisateur fonde ses oeuvres, sont éminemment sympathiques et inspirants : les êtres sont tous reliés sans en avoir conscience ; l'être le plus inutile en apparence, possède un rôle majeur dans le grand puzzle de la Vie... Des évidences, peut-être, mais qu'il est toujours utile de se remémorer. De manière simple, pour que chacun puisse capter le message. Mais de là à couler ces inspirations dans un moule aussi délirant, il y a tout de même un immense pas qu'il n'est pas bon de franchir inconsidérément, si l'on ne veut pas que l'éclat de rire devienne aveuglant et occulte le message. La tristesse est d'autant plus vive, que, dans quelques séquences, brille une lumière que l'on aurait aimé voir illuminer l'ensemble de l'oeuvre. En particulier, la scène courte, mais sobrement émouvante, au cours de laquelle Story énonce sa prédiction. Malheureusement, ces instants véritablement inspirés et magiques ne sont qu'une infime goutte d'eau dans un océan de puérilités désarmantes. Dommage aussi pour la prestation de Paul Giamatti, qui réussit l'exploit de toujours conserver à son personnage, authenticité et humanité.  
 
   Un petit conte initiatique pour classe de cours préparatoire. Mais, même dans ce domaine, on est ici, dans le microcosme préfabriqué où s'ébattent des caricatures plus improbables les unes que les autres (ah ! le culturiste qui ne développe qu'un côté... Il fallait le trouver, celui-là !), à mille lieues du souffle émotionnel que distillait Spielberg dans son "A.I.".
   
Bernard Sellier