1972. Voyager II est envoyé dans l'espace, porteur d'un disque sur lequel ont été gravées diverses informations destinées à faire connaître notre existence à d'éventuelles civilisations extra-terrestres. Quelques années plus tard, un objet non identifié est repéré par les radars de l'armée. Atteint par un missile, il s'écrase dans une forêt. Non loin de là, habite Jenny Hayden (Karen Allen), dont le mari, Scott (Jeff Bridges), est mort quelques mois auparavant. Elle noie souvent son chagrin dans l'alcool. Un matin, lorsqu'elle émerge, un être, quasiment semblable à son époux, se dresse devant elle. Il la contraint à l'emmener en voiture jusqu'à un mystérieux rendez-vous, qui doit avoir lieu trois jours plus tard. Elle comprend bien vite que l'homme est un extra-terrestre qui a revêtu l'apparence de Scott. D'abord effrayée, elle finit par suivre de son plein gré cet étrange humanoïde...
Les mordus d'anticipation, les fanatiques de "Star Wars", les fondus de "Star Trek", risquent de ne pas être enthousiasmés par ce film. Les effets spéciaux sont ici réduits à leur plus simple expression et le propos du réalisateur n'est évidemment pas de concurrencer les grandes oeuvres du genre. L'arrivée du visiteur et son incorporation grâce à l'ADN des cheveux de Scott est... pour parler gentiment, amusante. En revanche, celui qui est sensible à "E.T.", celui qui cherche l'approche humaine dans les relations entre habitants de la terre et créatures galactiques, ne sera peut-être pas déçu. John Carpenter a joué la carte de la simplicité, de la rencontre à la fois hyper-banale et exceptionnelle entre une femme qui se laisse glisser dans le désespoir et un étranger à notre monde, brutalement confronté aux rudiments de la civilisation aberrante que nous avons développée. Les péripéties, les événements sont rudimentaires : tentatives d'échapper à la police, à la bêtise et à la méchanceté humaines, à la peur de l'inconnu. Malgré cela, ou justement grâce à ce dépouillement modeste, le réalisateur parvient à captiver le spectateur en insufflant poésie, émotion, délicatesse, à ce road movie improbable et profondément mélancolique. Bien plus qu'un film de science-fiction, "Starman" est, tout comme "E.T." un grand film d'amour, de tolérance, d'acceptation de l'étrange(r). Le voyage vers le rendez-vous est avant tout initiatique, un apprivoisement mutuel, une leçon de compassion, le visiteur à l'expression marmoréenne se révélant en fait beaucoup plus "humain" que nombre de résidents terrestres. Jeff Bridges se montre saisissant dans son alliage de sécheresse menaçante et de bonté spontanée. On se souviendra longtemps de ses interrogations infantiles et fiévreuses : "définissez : amour". Karen Allen lui donne la réplique avec une belle sensibilité.