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Man on fire,
      2004,  
 
de : Tony  Scott, 
 
  avec : Denzel Washington, Dakota Fanning, Giancarlo Giannini, Rachel Ticotin, Marc Anthony, Christopher Walken, Mickey Rourke,
 
Musique : Lisa Gerrard, Harry Gregson Williams

 
   
John W.Creasy (Denzel Washington), ancien élément d'élite de l'armée, a sombré dans l'alcool. Il rend visite à l'un de ses anciens amis, Rayburn (Christopher Walken), qui lui procure un poste de garde du corps pour la fillette, Pita (Dakota Fanning), d'un riche industriel mexicain, Samuel (Marc Anthony). D'abord sur la réserve, Creasy s'attache bientôt à l'enfant. Mais, un jour, à la sortie de sa leçon de piano, Pita est enlevée... 
 
   L'avantage (ou l'inconvénient !) avec Tony Scott, c'est que l'on sait à l'avance quel type de spectacle va nous être proposé. Un bon scénario, une réalisation "solide", c'est-à-dire dans laquelle l'efficacité primaire est nettement dominatrice, des acteurs judicieusement choisis pour leur charisme (Tom Cruise dans "Top Gun", Denzel Washington (déjà !) et Gene Hackman, dans "USS Alabama", Will Smith dans "Ennemi d'état", Robert Redford et Brad Pitt dans "Spy game"...). Et, reconnaissons-le, cette primarité que certains appelleront des "gros sabots" produit parfois des oeuvres tout à fait passionnantes. 
 
   Ici, le scénario, réduit au minimum, divise l'histoire en deux parties bien distinctes. La première voit le lent réapprentissage du goût de vivre chez le guerrier taciturne, culpabilisé par ses actions antérieures, rongé par le remords. Ce n'est pas foncièrement original, mais Denzel Washington, mélancolique à souhait, parvient sans trop de difficulté à nous faire croire à cette rédemption intérieure, d'autant plus que l'ange qui permet la transfiguration, Pita, est bien servie par une petite Dakota Fanning qui ferait pleurer les pierres. Malheureusement, il y a bien sûr les méchants. En faisant disparaître l'ange salvateur, ils réveillent la bête qui sommeillait en Creasy, et cela nous donne droit à une seconde partie violente, forcenée, passablement complaisante, qui rappelle les expéditions punitives de Charles Bronson, alias Paul Kersey, dans la série des "Justicier dans la ville" de Michael Winner. Tony Scott ne s'embarrasse pas d'états d'âme et transforme son héros en implacable nettoyeur de la pourriture locale. Et Dieu sait qu'elle gangrène tous les niveaux de la société mexicaine qui nous apparaît, au sortir de la vision du réalisateur, un concentré d'enfer sur terre.  
 
   Si ce parti-pris, orienté pessimisme noir, peut choquer ou révulser dans son extrémisme, la forme contribue, elle aussi, à fortement agacer. Si le montage clipesque de "Ennemi d'état" se justifiait par les multiples et concomitants moteurs dispersés de l'action, il prend ici l'allure d'un maniérisme outrancier sans aucune légitimation narrative. La moindre scène d'action devient un puzzle à l'agitation hystérique, bardé de ralentis ridicules et de surimpressions cahotiques. C'est épuisant pour la vue, pour les neurones qui tentent de recoller des bouts d'images sans queue ni tête, et surtout sans intérêt majeur. Entre une moitié calibrée : pleurs dans les chaumières, et une moitié axée : vengeance frénétique tous azimuts, le film se déchire dans les outrances sans retrouver l'angoisse existentielle qui faisait le prix de "Ennemi d'état", par exemple. Heureusement qu'il y a Denzel Washington et Dakota Fanning...
   
Bernard Sellier