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Le placard,
      2001, 
 
de : Francis  Veber, 
 
  avec : Daniel Auteuil, Gérard Depardieu, Thierry Lhermitte, Michèle Laroque, Michel Aumont, Jean Rochefort, Alexandra Vandernoot,
 
Musique : Vladimir Cosma

  
   
François Pignon (Daniel Auteuil) est comptable dans une grosse entreprise de préservatifs. Sa femme l'a quitté deux ans auparavant et son fils ne désire plus le voir. Il apprend un jour, incidemment, qu'il doit être viré le mois suivant. Désespéré, il songe à se jeter du haut de son balcon, mais son nouveau voisin, Belone (Michel Aumont) réussit à l'en dissuader. Bien plus, il trouve une idée en or pour empêcher le licenciement : Pignon se fera passer, indirectement, pour un homosexuel. De la sorte, les patrons le garderont afin de ne pas risquer une attaque pour discrimination ! Tout se passe effectivement comme prévu. Mais l'intéressé est loin de se douter des conséquences de son calcul... 
 
   Retour du François Pignon nouveau ! Mais grand chambardement dans la personne de ce brave Français très moyen ! Non pas tellement à cause de l'arrivée de Daniel Auteuil pour incarner l'individu. Encore qu'à mon sens, ce choix ne soit pas forcément très adéquat, sans que les qualités de l'acteur soient en cause. Mais surtout par le changement de registre qui l'accompagne. Dans les premiers opus de Francis Veber (le génial "La chèvre", puis "Les Compères" et "Les Fugitifs") Pierre Richard envahissait l'écran grâce à sa dégaine lunaire et à son burlesque d'hurluberlu. Dans "Le dîner de cons", Jacques Villeret, apocalyptique, occupait tout l'espace de sa masse et de sa bêtise monomaniaque. Dans les deux cas, même si les tempéraments différaient, François Pignon demeurait le moteur actif du comique de l'histoire. Ici, Daniel Auteuil est devenu un François Pignon transparent. Potiche et catalogué comme "chiant" dès le début du film (ce qui ne transpire d'ailleurs pas de façon forcément évidente de son allure physique), il le demeure par la volonté du scénario, puisqu'il ne doit surtout rien changer à son comportement. Il devient donc un moteur passif et tout le travail comique actif est dévolu aux autres personnages.  
 
   C'est là, à mon avis, que le bât blesse quelque peu, car l'entourage peine à donner du mordant et du piment à ce sujet dans l'air du temps. Si l'on excepte le personnage de Michel Aumont, qui ouvre l'oeuvre sous les meilleures auspices, les autres intervenants ne sont pas vraiment passionnants. L'évolution psychologique (si l'on peut dire !) de Felix Santini (Gérard Depardieu), chef du personnel et gros macho raciste est à son image, c'est-à-dire que ce n'est pas d'une finesse extrême ! Kopel (Jean Rochefort), directeur de la boîte et Guillaume (Thierry Lhermitte) font plus de la figuration qu'autre chose. Idem pour Christine (Alexandra Vandernoot), épouse de Pignon, ainsi que pour celle de Santini (à la limite du grotesque). Seule Mademoiselle Bertrand (Michèle Laroque) tire un peu son épingle du jeu. Daniel Auteuil suit son petit bonhomme de chemin dans la quasi impassibilité dévolue à son rôle. 
 
   Le film semble peiner à trouver ses marques. Ce n'est pas une franche comédie (on rit assez peu). Ce n'est pas vraiment une étude psychologique (ou alors bien au ras des pâquerettes et passablement artificielle). C'est véritablement au spectateur d'aller dénicher le centre d'intérêt de l'histoire qui, plus encore que l'acceptation de la différence d'autrui, se situe, à mon sens, dans la puissance phénoménale de la rumeur et des apparences. A ce titre, "Le placard" pourrait être une illustration simple et moderne de la pensée du philosophe antique : "ce ne sont pas les choses qui nous troublent, mais l'idée que nous nous faisons des choses". 
 
   Une assez grande déception cependant...
   
Bernard Sellier