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The postman,
      1997, 
 
de : Kevin  Costner, 
 
  avec : Kevin Costner, Olivia Williams, Will Patton, James Russo, Larenz Tate, Giovanni Ribisi, Daniel von Bargen,
 
Musique : James Newton Howard


   
Nous sommes en 2013, dans l'Utah. Le monde civilisé et ordonné a totalement disparu. Ne subsistent, tout au moins dans les anciens "Etats-Unis", que quelques villages où se terrent des survivants affamés et désespérés. Un homme (Kevin Costner), accompagné de son cheval, joue, au fil de ses déplacements, du Shakespeare pour obtenir quelque nourriture et un logement. Un jour, il est capturé par le "Général" Bethlehem (Will Patton), chef d'une bande de pillards, les "Holnistes", qui se donnent l'apparence d'une armée en constitution. Ayant réussi à s'échapper, il découvre le cadavre d'un postier, mort depuis bien longtemps. Il endosse son uniforme, se saisit du courrier que le mort transportait, et arrive dans un village. Le Shériff du lieu, Briscoe (Daniel von Bargen), voit d'un très mauvais oeil la venue de cet étranger, mais la population, ravie d'avoir enfin des nouvelles de l'extérieur, fait du nouveau "Postier" son idole... 
 
   Après avoir donné naissance, sept ans plus tôt, à son mémorable "Danse avec les loups", modèle d'inspiration poétique, comment Kevin Costner a-t-il pu concocter cette machinerie aux ficelles hénaurmes ? Il faut dire que, précédemment, "Waterworld" avait déjà flirté avec les abîmes du grotesque. Dans le cas présent, le héros de "Bodyguard", déjà réalisateur adjoint sur le film de Kevin Reynolds, assume seul l'entreprise. Celle-ci se révèle, c'est un euphémisme, déconcertante !  
 
   A la manière d'un véhicule hybride, capable de passer successivement de l'énergie essence à l'électricité ou au bio-carburant, le film oscille constamment entre des genres divers. Tantôt nous sommes dans le western, tantôt dans l'épopée futuriste type "Mad Max", tantôt dans le romanesque larmoyant, tantôt dans le patriotique façon Mel Gibson, tantôt dans le mythe universel. Et tout cela s'étire interminablement sur trois heures. Le handicap majeur de l'ensemble réside dans son incapacité à tenir ses différents approches de manière harmonieuse et digne. Dommage, car le sujet en lui-même (redonner à l'homme l'espoir de la liberté grâce à la circulation de l'information) est aussi original que pertinent. Mais la meilleure bonne volonté est trop souvent mise à mal pour que le spectateur puisse garder son sérieux devant les "trouvailles" du réalisateur. Il serait intéressant, d'ailleurs, de connaître le roman d'origine, pour voir de quelle manière son auteur, en l'occurrence scénariste, a modulé le récit pour donner naissance à cette construction bâtarde. De majestueux travellings nous font découvrir le repaire minier des "Holnistes", et nous sommes dans l'univers de l'aventure épique. Dans la séquence suivante, les prisonniers huent le projectionniste qui présente "Universal Soldier" et réclament à corps et à cris "La Mélodie du Bonheur" ! Autant dire que dans le genre "comment casser une atmosphère soigneusement installée", il n'est guère possible de trouver plus efficace ! Et le reste est à l'avenant.  
 
   Pourtant, malgré les défauts et excès en tous genres qui émaillent la narration (héroïsme maladroit, patriotisme primaire, cassures de rythme, langueurs boursouflées...), l'enthousiasme naïf dans lequel baignent les personnages "positifs" finit par imposer ponctuellement sa marque. Le découragement fait baisser les bras devant certaines scènes (ah les ralentis générateurs de larmes aux yeux...), mais l'envie persiste de suivre jusqu'au bout cette quête infantile de l'Eden. Désarmant, il n'y a pas de doute...
   
Bernard Sellier