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La recrue,
     (The recruit),      2003, 
 
de : Roger  Donaldson, 
 
  avec : Al Pacino, Colin Farrell, Bridget Moynahan, Gabriel Macht, Kenneth Mitchell,
 
Musique : Klaus Badelt

  
   
James Douglas Clayton (Colin Farrell), est un as de l'informatique, mais gagne sa vie en occupant un poste de serveur. Il est contacté un jour par un responsable de la CIA, Walter Burke (Al Pacino). Après quelques hésitations, il accepte d'intégrer la formation des futurs agents secrets. Dans "la ferme", où a lieu l'entraînement, il fait la connaissance de Layla Moore (Bridget Moynahan). L'attirance qu'ils ressentent spontanément l'un pour l'autre, saura-t-elle résister à la pression qui leur est imposée jour après jour, épreuve après épreuve ? 
 
   La réponse est... Non mais !!! Pas question de révéler quoi que ce soit du déroulement de cette histoire, certes tordue et abracadabrante, mais sans nul doute moins exceptionnelle que certaines missions réelles. Roger Donaldson nous avait déjà donné, en 1987, une oeuvre passionnante et hautement électrisante, "Sens Unique". Après quelques passages à vide (une "Mutante" affligeante, entre autres), il retrouve ici un art souverain de la manipulation, fondé sur un jeu fascinant entre apparence et réalité, (façon "The Game"). Grâce à un scénario tout en artifices, en rebondissements, en fausses pistes, en trompe-l'oeil, le spectateur finit par ne plus pouvoir se raccrocher à ce qu'il voit, à ce qu'il entend, ballotté sans cesse entre vrais mensonges et vérités falsifiées. Après une ouverture en fanfare, dans laquelle le formateur Burke (Al Pacino toujours égal à lui-même, c'est-à-dire envoûtant), claironne que "la cause défendue est juste", que "les informations sont plus importantes que la vie", le récit plonge dans une réalité qui n'a plus grand chose à voir avec la noblesse initialement affichée. L'amour, l'amitié, la confiance, ne sont plus que des mots virtuels, des sentiments artificieux, dont la cible, l'intensité, la durée, la motivation, sont au service exclusif des missions reçues. Autant dire un monde schizophrénique dans lequel l'agent nage avec plus ou moins de stabilité psychologique. Outre cette plongée ensorcelante dans un univers de mensonges et de trahisons, le spectateur assiste à une intrigue matérielle habilement construite, dotée d'un rythme soutenu et d'un suspense assez diabolique. Les diverses péripéties ne sont pas réellement novatrices, mais leur conjonction s'opère avec une telle maestria, que la qualité de l'ensemble du puzzle se révèle supérieure à celle des pièces prises isolément.  
 
   Une très bonne surprise. D'autant plus que Colin Farrell se révèle très convaincant dans cette incarnation d'un personnage à la fois fragile et obstiné.
   
Bernard Sellier