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L'échange,
     ( Proof of life ),      2000, 
 
de : Taylor  Hackford, 
 
  avec : Russell Crowe, Meg Ryan, David Morse, David Caruso, Pamela Reed, Anthony Heald,
 
Musique : Danny Elfman


   
Peter Bowman (David Morse), employé par la compagnie internationale pétrolière "Quad Carbon", travaille dans un pays d'Amérique du Sud. Sa mission est de construire un barrage sur le rio Caya. Mais ce projet, qui n'était qu'une "vitrine humanitaire", capote dès que la société, en dépôt de bilan, est rachetée par Octonal. Un matin, Peter est enlevé par des guerilleros et emmené dans la montagne. Sa femme, Alice (Meg Ryan), reçoit la visite de Terry Thorne (Russell Crowe), spécialiste des missions de récupération d'otages, envoyé par la compagnie d'assurances de l'entreprise. Mais à peine a-t-il commencé sa mission, qu'il est rappelé à Londres, "Quad Carbon" ayant "oublié" de verser les primes ! Alice, en compagnie de sa belle-soeur, Janis Goodman (Pamela Reed), doit faire confiance à un responsable de sécurité local, Arturo Fernandez (Mario Ernesto Sánchez), pour mener les négociations. Enfin, théoriquement, car Terry, pris de remords, ne tarde pas à réapparaître... 
 
   Ayant acquis une certaine notoriété pour de bien peu cinématographiques raisons (l'idylle entre Meg Ryan et Russell Crowe !), ce film est pourtant tout à fait intéressant et d'une efficacité immédiate incontestable. Même si sa dernière oeuvre "Ray" a été saluée comme une remarquable création, Taylor Hackford a rarement enthousiasmé la critique. Sans atteindre une réussite majeure, la plupart de ses réalisations sont pourtant dignes d'intérêt, du romantique "Officier et gentleman" jusqu'au ténébreux "Dolores Claiborne", en oubliant un "Contre toute attente" moyen, malgré la présence d'une Rachel Ward à la beauté ensorcelante !  
 
   Dans le cas présent, nous avons affaire à une histoire simple, malheureusement plus que d'actualité, menée avec une sécheresse et une sobriété de bon aloi. Toutes les composantes d'une telle tragédie individuelle sont habilement mises en valeur : solitude du conjoint, compassion polie du Consulat, magouilles politico-economiques, anarchie des différentes composantes rebelles, évolution inéluctable des idéaux sociaux vers le crime organisé et lucratif (trafic de drogue ou enlèvements), et, surtout, affrontement psychologique entre les négociateurs. Celui-ci devient une sorte de "jeu" dans lequel la vie est suspendue à l'habileté plus ou moins grande de chaque interlocuteur pour parvenir à un "accord" acceptable. Pendant que cette bataille d'exigences, de détermination, de manipulation, se déroule devant un micro, les malheureux prisonniers, trimballés de camp en camp, dans des conditions d'hygiène lamentables, sont les lots, les jouets de la tractation plus ou moins efficacement menée par ceux qui ne les ont pas oubliés.  
 
   Toujours vivant malgré les tractations peu spectaculaires, concentré sur l'essentiel, dépouillé de tout superflu, le récit est conduit de manière énergique, brute, et réaliste. Il a, de plus, l'intelligence de faire l'impasse sur une histoire d'amour, suggérée, dont le développement aurait, sans nul doute, gangrené la pureté narrative de l'ensemble. Une antithèse, quasiment dans tous les domaines, du récent (et assez décevant !) "L'enlèvement", dans lequel Robert Redford subit un sort analogue à celui de David Morse.
   
Bernard Sellier