Bienvenue sur le site d'un manipulateur de mots, passionné d'écriture, de cinéma, de musique, d'ésotérisme...     

Sueurs froides,
      (Vertigo),    1958, 
 
de : Alfred  Hitchcock, 
 
  avec : James Stewart, Kim Novak, Barabra Bel Geddes, Tom Helmore, Henry Jones, Raymond Bailey,
 
Musique : Bernard Herrmann


   
John 'Scottie' Ferguson (James Stewart), quitte la police après une chute qui lui vaut plusieurs mois d'immobilisation. Il reçoit un jour un appel de l'un de ses anciens amis, Gavin Elster (Tom Helmore). Celui-ci, inquiet pour la santé mentale de son épouse, Madeleine (Kim Novak), désire la faire suivre. Après avoir passablement hésité, John accepte. Il se rend compte que la jeune femme se rend tous les jours au musée, s'assied durant des heures devant le portrait d'une certaine Carlotta Valdez, décédée depuis plusieurs décennies, puis se rend dans un hôtel qui était autrefois la demeure de la morte...  
 
   Cette histoire particulièrement sombre n'est pas sans évoquer "La maison du Docteur Edwardes", sorti treize ans plus tôt. Mais si une certaine superficialité régnait, tant dans l'intrigue criminelle, que dans l'évolution psychanalytique, au sein de l'oeuvre de 1945, elle n'est plus de mise ici. Hitchcock a délibérément fait passer au second plan le suspense meurtrier, pour se focaliser sur cette filature longue, répétitive, qui se transforme petit à petit en amour passionné. Et pathologique, cela va sans dire, le réalisateur ayant été manifestement attiré toute sa vie par les ressorts psychologiques des agissements humains. Tandis que Ingrid Bergman tenait dans "La maison du Docteur Edwardes" le rôle actif, et Gregory Peck celui de victime inconsciente, traumatisée, dont il était indispensable de dénouer les rouages emmêlés, les positions sont ici plus complexes. Chacun des deux protagonistes est à la fois, subtilement, actif et passif.  
 
   John (joué très finement par James Stewart) est un complexe amalgame de culpabilité, de scepticisme, de passivité, d'infantilisme, de fétichisme. Quant à Madeleine, elle symbolise le pouvoir de l'amour qui est capable d'accepter tous les sacrifices. D'abord assez inexpressive dans son visage, pendant la première partie du film, elle finit par devenir touchante au fur et à mesure que sa personnalité véritable se fait jour. Cela dit, tout en reconnaissant que sa neutralité est en adéquation parfaite avec le registre qui lui est confié, il est évident que Kim Novak, archétype de l'héroïne hitchcockienne blonde, ne possède pas le charisme exceptionnel de Grace Kelly ("Le crime était presque parfait") ou de Joan Fontaine ("Rebecca"). L'année suivante, Hitchcock abordera avec "La mort aux trousses" un registre beaucoup plus léger et particulièrement jouissif. 
 
   Une œuvre intense, inondée d'une couleur rouge omniprésente (les décors, les fleurs, les cravates de John...), dont la fausse simplicité cache une profonde descente dans l'enfer des passions, mais qui, à mon sens, ne possède pas la noblesse transcendante, l'aura de mystère et de mélancolie désespérée, qui nimbe "Rebecca".
   
Bernard Sellier