The fall, saison 1, série de Allan Cubitt, commentaire

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The fall,
      Saison 1,      2013 
 
de : Allan  Cubitt..., 
 
avec : Gillian Anderson, Jamie Dornan, Aisling Franciosi, John Lynch, Niamh McGrady, Bronagh Waugh, Stuart Graham,
 
Musique : Keefus Ciancia, David Holmes


 
Saison 2     Saison 3

 
Ne pas lire avant d'avoir vu la série

 
Belfast. La commissaire divisionnaire Stella Gibson (Gillian Anderson) arrive de Londres pour relancer l'enquête sur le meurtre d'Alice Monreo, dont le père, Morgan (Ian McElhinney) est un homme politique influent. Contrairement à son collègue Jim Burns (John Lynch), Stella est persuadée qu'un tueur en série sévit dans la ville. Elle a pleinement raison, puisque celui-ci, psychanalyste de profession, a pour nom Paul Spector (Jamie Dornan), et compte bien s'attaquer à une nouvelle victime...
 
 Décidément, après «Broadchurch», ou encore «Happy Valley», le Royaume Uni réussit particulièrement bien aux créateurs de séries. Dès les premiers plan, il est évident que l'originalité du concept et la qualité de son traitement narratif sont au rendez-vous. La première interpelle d'emblée. Tout comme dans un Columbo de la grande époque, nous avons immédiatement connaissance de l'identité du tueur. Un jeune homme beau, brillant, intelligent, père de famille modèle envers ses deux enfants, époux apparemment sans histoire de Sally Ann (Bronagh Waugh), infirmière dans un service néonatal. L'opposé absolu du tueur psychopathe et sadique que l'on vient de rencontrer dans la première saison de «Bom dia, Verônica». Mais l'homme n'en est que plus dangereux, puisque parfaitement insoupçonnable. Son parcours criminel s'inscrit dans le contexte politico-religieux de l'Irlande, toujours secouée par des tensions souterraines puissantes qui ne demandent qu'à exploser. Quant à la qualité narrative, elle s'affiche aussi sans ambiguïté possible dès le commencement du récit. Les personnages sont abordés avec un réalisme sobre, sans aucun effet tape à l'œil ou spectaculaire, et expriment leur vérité existentielle de manière spontanée, quelle que soit la couleur morale de celle-ci. Un intéressant parallèle se développe au fil de l'histoire entre les deux personnages principaux, antagonistes dans les faits, mais au bout du compte proches psychologiquement. Stella, tout comme Paul sont dans le contrôle tout en offrant au monde une facette plus acceptable. L'un des paradoxes majeurs réside même dans le fait que le tueur sait se montrer davantage dispensateur d'empathie que la policière. Seul scénariste à bord, Allan Cubitt est parvenu à enrober de manière exemplaire cette quête du tueur en série, cent fois vue par ailleurs, avec des intrigues complémentaires, diverses, qui contribuent toutes à enrichir de manière émouvante, psychologique et subtile cette chasse à l'homme. Les dialogues savent allier concision, crédibilité et intelligence, tout en sachant donner toutes leurs valeurs aux silences. Il est intéressant, pour un apprenti scénariste, de mettre en parallèle quelques scènes tirées de cette série avec un certain nombre extraites d'un épisode de «Section de recherches» (vu récemment par accident). Il pourra mesurer l'abîme qui sépare une écriture inspirée d'une caricature artificielle, primaire, et gonflée aux poncifs. Le reproche que l'on peut éventuellement porter à cette création concerne sa lenteur et ce qui peut ressembler à une certaine stagnation de l'intrigue. Mais le réalisateur a eu l'intelligence de se limiter à cinq épisodes pour cette première saison, qui offre au spectateur une peinture humaine aussi riche qu'envoûtante. Et Jamie Dornan a su conférer une grande sobriété expressive à ce personnage schizophrénique à la fois fascinant, attachant et hautement dangereux.  
   
Bernard Sellier